Venir en France, découvrir la culture, améliorer la maîtrise de la langue, côtoyer notre culture et poursuivre ses études, tels étaient les objectifs de Thoai quand il a posé le pied sur le sol français mi-janvier (voir article Thoai est en France).

Début février, il a entamé les cours de perfectionnement en français, a commencé à travailler le soir dans un Mac Do et s’est familiarisé avec notre code de la route à bord de Bigoudi, sa petite voiture…
Des projets on en avait plein la tête pour lui : visiter Paris, aller au bord de la mer, longer les bords de Loire, arpenter les rues d’Angers et boire un café en terrasse… Nous avions aussi prévu de rencontrer les parrains marraines de Pousse-Pousse à l’occasion de l’assemblée générale en juin.

Deux mois après son arrivée, Thoai maîtrisait parfaitement le réseau de bus, commençait comme nous à « manger les mots », se découvrait une vraie passion pour le jardinage et vouait une affection sans limite aux deux Golden Retriever qui lui rendaient bien.

Mais il n’avait pas de « plan », pas de « quand il fera beau on ira »… Alors quand le COVID est arrivé, quand il a fallu se confiner chez soi, quand le temps a été suspendu, pour Thoai rien n’a changé ou presque. Son emploi du temps s’est modifié mais pas sa façon de vivre.

Depuis quelques années en Europe, mode est à la méditation, au lâcher prise, au « vivre chaque moment comme si c’était le dernier »On part en stage, on paye des coachs, on dévore des livres sensés nous apprendre à « vivre mieux ». On respire, on souffle, on prie … on essaye tant bien que mal de trouver une sérénité , voire un sens à la vie.

Thoai, lui, n’a pas besoin de tout cet arsenal artificiel : il vit chaque minute « pour de vrai ». Il y est , il est là, présent au monde. Il est présent tout entier à chaque geste qu’il fait, chaque action qu’il mène. Le COVID n’a rien changé à sa façon d être au monde. Chaque jour pour lui est une vraie fête. Thoai dit que chaque matin il est étonné de se réveiller dans un vrai lit, que chaque fois qu’il pleut il trouve merveilleux que les gouttes de pluie ne traversent pas le toit. Ce qu’il aime par-dessus tout c’est se lever la nuit, ouvrir le frigo et constater qu’il peut manger s’il a faim.

Il est libre, bien plus que nous ne le serons sans doute jamais. Quand on le regarde vivre, ce petit bout de bonhomme si frêle, on se surprend à sourire. Il est l’image même du bonheur parce que lui sait que rien ne dure, que tout est impermanent. Thoai dit souvent « chacun a un numéro ». Il respecte certes les mesures pour se protéger et protéger les autres mais il n’a pas peur. Il a ce détachement de ceux qui croient au destin.

Il bêche, sème et plante avec minutie et précision : il prend son temps. Il arrache les mauvaises herbes avec douceur. Le soir, Thoai fait le tour de « son » jardin avec lenteur. Chaque plant, chaque fleur est regardé avec intérêt.

Il jardine avec Izu, la Golden Retriever qui ne le quitte plus. Il lui parle, lui raconte sa vie. Ces deux là s’en vont parfois sur le chemin, chacun réglant son pas sur le pas de l’autre. Il n’y a pas de maître, il n y a pas de chien : juste deux amis qui s’apprécient, en silence et marchent auprès des cerisiers.

Regarder Thoai vivre, c’est apprendre à respecter le temps qui nous est offert; accepter la pluie qui tombe alors qu’on avait prévu une promenade. Il est des rencontres qui bouleversent toute une vie, qui viennent ébranler toutes nos certitudes. Thoai nous apprend qu’on ne maîtrise rien ou si peu de choses. Il nous enseigne que nous devons accepter la pluie qui tombe, le voyage reporté, la perte aussi.

Son éternel sourire est une vraie leçon de vie et d’humilité aussi.

THOAI au temps du confinement ou l'art d'aimer chaque instant


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Catégories : Tranche de vie

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