Minh Thien n’ est plus un inconnu pour vous qui parcourez ce site. C’est ce gosse que j’ai trouvé dans les marigots, quand il était adolescent de la boue jusqu’au cou. Si maigre et déjà si volontaire. Il vivait au fin fond de TAN THOI, avec ses parents et sa petite sœur, dans une misère terrible.
Minh Thien a vite été parrainé, et il a pu poursuivre sa scolarité. Mais rapidement sa cage thoracique enfoncée l’a empêché de respirer. Il a été opéré en urgence, grâce à un formidable élan de solidarité pour financer cette intervention. Il a souffert, tellement. Et puis il a repris les cours et même le foot.
Deux ans après il a été nécessaire de l’opérer de nouveau pour retirer les barres qui avaient été introduites dans son thorax. Là encore il y est allé, sans se plaindre, jamais.
Minh Thien est entré à l’université, il a décroché son entrée dans une bonne université. La vie semblait lui sourire. Et puis au printemps, son frère de 23 ans s’est fait faucher par une voiture, à SAIGON. Il est mort.
Minh Thien a soutenu sa famille, sa petite sœur. A la cérémonie il a chanté, dansé, pour célébrer son frère.
Cet été, nous nous nous sommes rencontrés souvent, et j’ai été de nouveau frappée par sa dignité, et sa sérénité. Son regard triste, son sourire doux… Il faut continuer à avancer.
Et puis la semaine dernière, sa sœur m’a contactée pour me dire que son frère avait été victime lui aussi d’un accident de la circulation. Il se rendait en cours et un homme ivre l’a fauché de plein fouet. Multiples fractures ouvertes. La peur de ses parents, l’angoisse de ne pas réussir à récolter la somme nécessaire afin qu’il soit opéré…et sa douleur.
Minh Thien a été opéré. Il est rentré deux jours après chez lui, en proie à des douleurs terribles. Jour et nuit, nous parlons, de tout, de rien, de son angoisse de ne pas pouvoir reprendre les cours, de sa jambe cassée et transpercée par des barres en fer.
Il me dit sa souffrance, sans plainte aucune. Il constate que chaque jour la douleur empire et me met face à mon impuissance totale. Sentiment de trahison : lui là bas, moi ici avec comme seuls antalgiques, des mots.
Je confiais à un ami, là bas, ma colère et mon chagrin face au sort qui s’acharne sur Minh Thien et voici ce qu’il m’a répondu : Số em như vậy rồi chỉ cầu mong em mau khỏe lại ( c est son numéro, on peut seulement prier pour qu’il se rétablisse)..
C’ est ce fatalisme, cette acceptation du « destin » qui se reflètent dans les yeux de Minh Thien. Aucun humain ne peut se battre contre ce qui a été décidé ; cet accident est arrivé : point.
Qui dira cette douleur insupportable de celui qui ne peut rien pour soulager la douleur de l’enfant ? Ce supplice de l’écouter parler de sa souffrance, et n’avoir rien à proposer que des mots vains. C’est lui qui me console, qui essaye d’apaiser ma colère et mon impuissance.
Cô gửi cho con những lời động viên là con rất vui rồi ạ : tu me dis des mots pour m’encourager et cela me rend très heureux.
Minh Thien m’enseigne l’humilité.
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